- Autobiographie : Lettre à Verlaine / Stéphane Mallarmé ; avant-dire du Dr Edmond Bonniot.- Paris (19, quai Saint-Michel) : Albert Messein éditeur, MLMXXIV [1924].- n.p. ; 29 cm.- (Les manuscrits des maîtres).
- Il a été tiré de ce livre : 4 exemplaires sur Japon hors commerce ; 15 exemplaires sur Chine hors commerce ; 50 exemplaires sur Chine numérotés 1 à 50 ; 1000 exemplaires sur pur fil Lafuma numérotés 51 à 1050. [Exemplaire] n°484.
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AVANT-DIRE
A la demande de Verlaine, Mallarmé lui avait adressé pour les Hommes d'aujourd'hui les lignes qu'on va lire, où son historiographe devait puiser. Celui-ci y prit en effet quelques documents, quelques détails « vus véridiques » selon le vœu de Mallarmé, mais si intéressants que soient ces extraits, ils ne sauraient remplacer la naïve et douce rigueur du texte original.
Biographie ?, confession plutôt ; — davantage, testament anticipé, pathétique de toute l'émotion qu'engendre le regard soit en arrière déjà, soit en avant, du Poète placé au centre de sa vie. On assiste à quelque chose comme le portrait du peintre par lui-même, où plus que le sobre contour transparaît en dessous l'irrévélé de son être.
Mallarmé, on le sait, souhaitait la disparition posthume de sa correspondance, considérée par lui comme besogne non littéraire. Pourtant si une exception peut avoir lieu, il semble ici que cela devienne un devoir.
Cette lettre n'est pas une œuvre : elle est mieux qu'une œuvre, — le sang même du Maître, affluant sous chaque ligne ; l'énoncé neutre exprès et en demi-teinte laissant tout deviner.
Peut-être existe là pour moi, dans le cas actuel, une raison valable d'enfreindre la formelle interdiction. Outre la prescience poignante que ses forces lui permettront de réaliser une partie seulement de l'Œuvre entrevue, le moindre mot tombé de sa bouche retentit assez profondément en l'esprit de ses admirateurs pour qu'ils ne me sachent point mauvais gré de cette publication.
Telle excuse, et, je le voudrais, l'absolution à moi donnée par l'âme elle-même de Mallarmé, éparse maintenant parmi ses véritables clients.
Je dois, en terminant, des remercîments [sic] au consciencieux éditeur Messein pour le soin apporté à la reproduction de cet autographe, jusqu'à rendre l'impression du cursif crayon avec quoi il fut écrit.
Dr. EDMOND BONNIOT