- Fôves du Baron d'Fleuru : 3ème recueil / Henri Pétrez ; illustrations en couleurs de Benjamin Rabier, [préface de Georges Fay].- Charleroi : Pierre Heraly éditeur, [1950].- 163 p. -[1] f. de pl. en front. : ill. en coul., couv. ill. en coul. ; 22,5 cm.
- De cet ouvrage il a été tiré : 15 exemplaires hors commerce marqués de A à O ; 100 exemplaires de luxe numérotés de 1 à 100 et dédicacés par l'auteur.
PRÉFACE
Les hommes sont de grands enfants : ils ont toujours aimé et ils aiment toujours qu'on leur raconte de belles histoires.
Si Peau d'Ane m'était conté
J'y prendrais un plaisir extrême...
J'y prendrais un plaisir extrême...
Eh oui ! le pittoresque, le merveilleux, signes d'évasion, ont toujours séduit.
Il ne faut pas chercher ailleurs ce goût inné du romanesque, et l'on peut y associer l'apologue, ancêtre de la fable, où agissent non seulement les hommes, mais les animaux, les plantes, les êtres inanimés et les dieux. Vieux comme le monde, l'apologue a traversé les civilisations, les continents et les âges, pour se retrouver toujours semblable dans les lois morales qu'il illustre.
La fable d'aujourd'hui est aussi proche des contes indiens et chinois que des moralités d'Esope, des hysopets du Moyen Age et des récits du bon Jean de Lafontaine.
Voici donc que l'héritier spirituel dialectal de tant d'auteurs, notre excellent Henri Pétrez, nous propose son troisième recueil de fables wallonnes.
Il a continué, dans sa manière si personnelle, à nous narrer et à nous moraliser. Pour bien affirmer son dessein, il a repris certaines de ses œuvres, qui ont gagné en concision, et qu'il joint aux inédits de ce livre.
Ses illustrations sont de l'inimitable Benjamin Rabier, poète de la gent à poil et à plumes. Benjamin Rabier ! Tout un monde !... Hélas ! c'est à titre posthume qu'il collabore avec Henri Pétrez dans ce livre. Cela donne à l'ouvrage une valeur accrue et personne ne s'en plaindra.
Et que throuverons-nous, au long des cinquante fables qui composent le recueil ?
La même originalité qui a fait connaître l'auteur comme un authentique fabuliste. Le procédé direct : personnages vite typés, décor planté en quelques traits nets, histoire contée sans à-côtés, sans digressions qui viennent l'alourdir, moralités simplement et savoureusement exprimées.
En veut-on des exemples ?
Lapidaire : Li tchvau, li dromadére èt l' chamau
S'on d'vait pwârter su s' dos, l' mwés qui n'èst nén vèyu,
A m' n'idéye gn-a bén wére qui n' sèréne nén bossu !
Catégorique : Li pourcia èt l' manequin
Disses s' monde-ci
C'est souvint l' môde
L' cén qui prustit
Ni mindje nén l' tôte.
Humoriste : Li coq
Oyi, faut yèsse in fèl coco
Pou n' nén toûrner a sot din-ène parèye pèkéye
Et co tchanter cocorico !
Emu : In nid d' masindje dins n' bwèsse aus lètes
L'ome qu'est vèyu volty' des p'tits mouchons, qué chance !
Il y a, dans ces cinquante fables, la gamme des sentiments que l'on ressent selon la diversité des situations exposées. Au fond, Henri Pétrez est un tendre. La misère l'émeut. Il est un simple. Il abaisse les orgueilleux. Il est un juste. Il stigmatise les méchants.
Ses élans le portent vers les bons et les faibles qu'il défendra et secourra. Sa réprobation sera entière pour les ingrats, les envieux, les hypocrites. C'est le chemin de la sagesse qu'il suit.
Lecteur, quand tu finiras ce livre, je suis certain que tu diras comme moi : « J'aime Henri Pétrez parce qu'il me parle avec son cœur, un cœur de vrai Wallon, sans emphase et sans détour. »
George FAY.
L'ôrtografe walone aprîje en dîs minutes.
REGLES GENERALES
(en français pou mia comprinde).
REGLES GENERALES
(en français pou mia comprinde).
VOYELLES.
Sons brefs : a eu (e) - i - o - u - ou
Comme dans les mots : lac - neuf - vif choc - lune - fou
Sons longs : â - eû - î - ô - û - oû
Comme dans les mots : pâle - peu - île - autre - mûre - douce
TRES IMPORTANT : e sans accent est toujours muet en wallon ; il ne s'emploie donc jamais pour eu. Ex. : Loup s'écrit : leup et se prononce : le.
On peut élider ou garder le e à l'intérieur du mot. Ex. : doûç'mint ou doûcemint.
Donc, insistons, le e pour être sonore doit toujours avoir un accent.
é - è - ê - répondent aux sons français : blé - près - fête.
Les formes au - eau pour ô, ne sont tolérées que dans le cas où, par analogie, elles se justifient avec le français.
ain - ein - aim - en - ien - ym s'écrivent in.
Les accents parasites du français sont supprimés et le tréma sans emploi en wallon.
CONSONNES.
b-p ; d-t ; f-v ; l-r ; m-n ; j- ch ; s-z-x ; c-ç ; g-gu-gn ; ont la même valeur qu'en français. Évitez les graphies ph - th - ch (k). Ex. : physionomie : filosomie - théâtre : tèyate - choeur : keûr ; tch et dj consonnes wallonnes. Le signe dg ne s'emploie dans aucun cas.
La lettre k ne remplace c que devant e ou i ; q - qu ne s'emploient que par analogie avec le français.
Le h ne s'écrit que s'il est aspiré ; sans emploi à Fleurus.
Le w ne se prononce jamais v. L'y n'a jamais la valeur de deux i ; semi-voyelle de liaison il se prononce comme dans : yeux ; il remplace l'l mouillée. Ex. : Un : yink - être : yèsse - fille : fige - jolie : djolîye - indisposé : fayé - dorée : doréye -gentille : djintîye - Pays s'écrit pays comme en français mais se prononce : pa.yi - Payer s'écrit payî mais se prononce pa.yî - etc... etc...
REMARQUES.
On écrit : dèl ou dé l' - al ou a l' - sul ou su l' - poul ou pou l' etc... Le l est séparé lorsqu'il y a voyelle consécutive. Ex. : dèl tère - dé l'ôr ; al pwate - a l'uche ; sul twèt - su l'eûwe ; etc...
La consonne n'est doublée que lorsqu'elle se prononce double ou a pour but d'empêcher l's simple placé entre deux voyelles de se prononcer z. Afin que le lecteur ne confonde pas et respecte les voyelles nasales, dans certains cas, les consonnes sont séparées par un point. Ex. : Personne : pèrson.ne (se prononce donc : pèr-son-ne et non pèr-sone) - saigner : son.nér - peine : pwin.ne - avoine : awin.ne - sale : man.né - oncle mon.nonke - etc... etc...
Lorsque le wallon fait entendre la consonne finale, parfois muette en français, on l'accentue d'une apostrophe. Ex. Tabac : toubac' - fusil : fusik' - air : ér' (se prononce donc ère) - frais : fris' - estomac : stomac' - tomber : tchér' - vingt : vingt' (se prononce donc vinte) - moins : mwins' - as-tu vu ? as' vèyu ? - etc... etc...
Le tiret indique la liaison. Ex. : Dans un : din-in - ton nez : tn-nez - cent oeufs : cint-oûs - sans oeufs : sins-oûs - il est parti : il è-st-èvoye - tout au matin : tt-au matin - gros et beau : gros-èt bia (liaison) - gros homme : gros ome (pas de liaison), etc... etc...
PARTICULARITÉS.
Sons nasaux n'existant pas en français : én Ex. : Chien : tchén - chemin : tchmén - kénkén : eau de réglisse - ô (n). Son intermédiaire entre au et on. Le ô est employé afin d'éviter une graphie composée qui déroute le lecteur ; d'ailleurs, l'intonation juste sera rendue, naturellement, par les wallons intéressés. Ex. : Pauvre : pove - cou, coup : cô, côp - etc... Du, article contracté, employé tel de nos jours, se traduisait à Fleurus, il y a un siècle par : dô et dou.
ATTENTION.
En lisant les dialectes, des lecteurs donnent de la valeur à des lettres qui n'en ont pas et qui sont conservées par analogie avec le français. En conséquence, il suffira, dans la plupart des cas, de se référer à l'orthographe et à la prononciation française. Ex. : Fruits : fwîts (prononciation : fwî et non fwî-tt-ss) - pieds : pîds (pî) - doigts : dwègts (dwè) -longtemps : longtimps (lontin) - neufs : noûs (noû) - neuf (9) : neuf' (neufe) etc... etc...
POÉSIE.
La rime étant faite pour l'oreille et non pour les yeux, en wallon, on peut faire rimer certains couples où l'oreille ne perçoit aucune différence. Ex. : be et pe : bâbe et pâpe - c, gu, qu, k : stomac', bague, ake, chaque - ch et j : anche et mélange - te et de : bate et salade - dj et tch : gadje et atche - fe et ve : galafe et dispave, etc... etc...
TRADUCTION LITTÉRALE.
La traduction française mise en regard du texte wallon ne se veut pas littéraire. Elle épouse d'aussi près que possible la version dialectale par déférence envers le lecteur et pour la facilité de celui-ci.